
Honnêtement, je ne pensais pas écrire un article sur le deuil dès maintenant, mais mes doigts brûlent le clavier. Mes doigts crient ! Mes doigts sont en colère ! Mes doigts sont dans l’urgence. Mes doigts sont dans la peine.
Pourquoi ? Parce que depuis quelque temps, je vais sur les forums. Je ne connaissais pas avant de commencer la rédaction de ce blog. Sincèrement, merci à tous les administrateurs de ces groupes qui permettent à la parole de se libérer (mais aussi à la joie d’exploser).
Que de belles histoires ! Que de résilience ! Que de capacités à aller de l’avant de la part de toutes les Fillesfiv.
Que d’histoires douloureuses ! Que de difficultés à faire le deuil ! Que de douleurs refoulées !
Alors, voilà : je le dis haut et fort : les fausses couches en PMA ça devrait être interdit par les lois de Dieu, de l’Univers et de Dame Nature.
Et les fausses couches en PMA, il est indispensable de les vivre. Pleinement. De ne pas rejeter les émotions qu’elles suscitent. Un deuil qui n’a pas été réalisé fragilise les relations futures et, dans notre cas, ce sont les protocoles futurs qui sont impactés. Comment accepter une nouvelle grossesse quand on n’a pas dit au revoir à l’enfant perdu ?
Exceptionnellement, l’extrait du roman Le vide de leurs entrailles vient maintenant.
Petit point contextuel : Marie, l’héroïne est, de nouveau enceinte, mais elle est angoissée, traumatisée par sa précédente fausse couche et une chanson lui trotte dans la tête « T’es pas là, mais t’es où ? » (chanson de Vianney), elle en parle avec sa psy :
« ¾ Et vous, vous en pensez quoi ? Il est où votre embryon perdu ? Doit-il être quelque part d’ailleurs ?
¾ À l’époque de cette fausse couche, tous me tenaient le même discours. Ma famille, mes amis, les médecins, les médias, l’opinion publique. Tous étaient d’accord : à deux mois de grossesse, ce n’est pas un enfant, c’est un amas de cellules. C’est rien. C’est rien et pourtant, je l’aimais mon microscopique amas de cellules, mon infime rien, ce minuscule cœur de rien du tout qui avait jadis battu. Comme ce chanteur, je cherche mon amour perdu : non seulement il n’est pas là, mais en plus où est-il ? Et comment faire son deuil si je ne sais pas où il est parti ? » Rose Héléa, Le vide de leurs entrailles
La reconnaissance du traumatisme en PMA
Le pire dans un traumatisme c’est l’absence de reconnaissance de ce traumatisme. Une souffrance qui n’est pas validée, pire qui est niée, peut devenir un abcès purulent. Or nous, dès qu’un transfert d’embryon ne fonctionne pas, c’est déjà une perte. Un processus de deuil devrait être mis en place. Sauf que la société ne légitime pas notre souffrance. Alors, on la cache, on l’enfouit. On se fabrique un petit tas d’échecs qu’on laisse pourrir dans un coin de notre tête et de notre cœur et on avance. Parce qu’il faut avancer ! Il faut se lancer dans l’insémination suivante, le TEC suivant, la FIV suivante et sourire ! Après une stimulation ou un TEC manqué, il nous arrive de tout de suite nous remettre dans l’action, de passer au protocole suivant. D’oublier de prendre un temps pour accepter l’émotion. La colère, la tristesse, l’impression d’injustice, la jalousie etc. Pour nous, comme je l’ai déjà dit, il n’y a pas que la mort qui mérite un deuil. L’absence d’une vie aussi. Le vide de nos entrailles aussi. (voir article Interview Clara Falala-Séchet, psychologue clinicienne et psychothérapeute, dans la catégorie « Elles nous aident, elles nous parlent ».)
Quand enfin la première prise de sang révèle une grossesse, mais que celle-ci ne dure que quelques jours, on nous dit que c’était juste un amas de cellule. Que ce n’était rien. Et on jette notre souffrance sur le petit tas de déchets émotionnels.
Quand on perd un bébé à deux mois à trois mois, voire plus. On nous affirme que c’est un mal pour un bien, car cela signifie que quelque chose n’allait pas de toute façon. Certains nous racontent des histoires encore plus horribles, d’autres poussent la connerie (désolée) jusqu’à déclarer qu’au moins nous, on fait nos nuits !!
Bref, sur les petites phrases, on peut écrire un roman entier (voir l’article « Livre. C’est parce que tu y penses trop! De Mia Fievez ») et ce n’est pas l’objet de cet article.
J’explique souvent qu’il convient d’apprendre à se connaître, à observer nos émotions pour pouvoir s’en détacher et mieux les vivre. Alors, accordez-vous le temps du deuil. Connaître ce processus, c’est pouvoir le vivre. Et le vivre c’est accepter nos douleurs et arriver à s’en détacher. Et pourquoi pas, à en faire quelque chose de plus grand.
Mais avant toute chose, petit rappel : un suivi psychologique est parfois indispensable en PMA. Je l’ai déjà dit et je le redis et je le répéterais. Si la douleur est insurmontable, si vous ne retrouvez pas le goût, il convient, je pense, de consulter. Sinon, vous avez l’excellent chatbot « Owlie » déjà mentionné (voir Interview Clara Falala-Séchet, psychologue clinicienne et psychothérapeute, dans la catégorie « Elles nous aident, elles nous parlent »).
Les cinq étapes du deuil
Lorsque vous traversez un deuil, il y a cinq rendez-vous incontournables :
Le choc. C’est le moment où l’on se dit « ce n’est pas possible ». Ce n’est pas vrai. C’est un cauchemar. Certaines crient, d’autres tombent, d’autres arrêtent de parler, vomissent, font une syncope etc. Le corps se bloque parce que le cerveau ne veut pas accepter.
Le refus. On ne réalise pas et on rejette tout en bloc. On veut revenir en arrière, aux minutes précédentes, aux heures précédentes. On jette le compte-rendu de la prise de sang à la poubelle. On n’écoute pas ce que dit le médecin. Personnellement, après l’annonce par l’échographe que le cœur de mon bébé s’était arrêté à 11 semaines et cinq jours, je n’y ai pas cru. J’ai arrêté de parler et j’ai attendu. C’était tellement impossible à concevoir pour moi (et pourtant je m’y attendais. Voir l’article sur le 6ème sens ou l’intuition : vous êtes la fée ! (et pas une méchante sorcière folle) dans la catégorie « Psy ») que la gynécologue des urgences a aussi refait une échographie (bon faut dire que mon bébé s’était vraiment bien développé et avait bien grandi). Donc le choc. Notre cerveau n’arrive pas à traiter l’information.
Vient ensuite la colère. La colère contre son propre corps qui n’a pas voulu fabriquer des beaux ovocytes, qui n’a pas voulu que la nidation ait lieu, la colère contre le corps médical qui n’a pas voulu écouter notre instinct quand on lui disait que quelque chose n’allait pas, ou qui a préconisé le transfert de deux embryons malgré les risques d’une grossesse gémellaire, la colère contre nous-même parce que justement on a voulu multiplier nos chances de grossesse et on a demandé le transfert de deux embryons alors que l’équipe médicale nous avons justement prévenue de tous les risques, la colère contre l’injustice parce que nos copines tombent enceintes rien qu’en regardant leur mec, la colère contre notre belle-mère qui nous colle sous le nez les photos de nos petits neveux, la colère contre notre belle-sœur/copine qui nous traite d’égoïste parce qu’on a été incapable d’aller voir son bébé à l’hôpital. La colère. La colère. La colère. La colère rouge passion. La colère noire explosion. La colère grise dépression.
La dépression. La perte du goût de vivre. L’envie d’abandonner la PMA parce qu’on n’arrivera pas à tout recommencer. Plus rien ne nous plaît. À ce moment-là, on supporte encore moins d’entendre des phrases du style « ça va aller » parce que c’est nier la réalité de notre souffrance. Dans le deuil d’un être cher, pendant cette phase, il est essentiel de pouvoir parler du défunt. Sauf que nous, nous sommes les seules à avoir porté cet embryon. Nous avons que très peu de moments avec lui. Alors que peut-on partager ? On se retrouve solitaire.
L’acceptation. Une nouvelle relation à l’être perdu peut se développer. Comme fonder une association en son nom ou continuer son travail. Pour nous c’est compliqué, une fois encore, parce que l’enfant n’a pas existé. Mais on peut aller de l’avant en mettant, toute seule, en place un rituel de liaison. Aujourd’hui, je fête encore, dans ma petite caboche de nouille, les dates où j’ai appris que j’étais enceinte et je pense aux possibles dates d’accouchement. Je remercie ces deux petits êtres d’avoir été présents dans ma vie. Et je me dis que c’est grâce à eux que j’ai été jusqu’au bout. Parce qu’ils m’ont montré que c’était possible. Parce qu’ils m’ont montré que j’étais capable de survivre à leur perte. Parce qu’ils m’ont montré des outils pour avancer et des armes pour me battre contre la fatalité. Si je n’avais pas été enceinte d’eux, si je n’avais pas porté l’espoir en mon ventre grâce à eux, aujourd’hui je ne serais pas mère.
Alors, voilà. Le deuil n’est pas linéaire. La colère revient. La tristesse aussi. Et faire le deuil ne veut pas dire que le vide ne vous fera plus mal. Mais vous pourrez vivre, vous vous autoriserez à être heureuse et surtout, surtout, en faisant le deuil vous serez capable de vous investir dans une nouvelle relation. C’est-à-dire tenter de vivre une autre grossesse. Vous vous autoriserez une autre grossesse. Ou vous vous autoriserez à être mère d’une autre manière, car il y a mille façons de s’entendre dire « maman ».
Voilà tout pour aujourd’hui! Si vous avez des questions, n’hésitez pas à m’envoyer un message. Vous pouvez par ailleurs, dans un commentaire, nous parler de vos expériences de visualisation en PMA.
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